PARIS : Lucide avec Karine Viard au Théâtre Marigny

D'accord, j'y allais déjà conquis : je reconnais sans détour que je suis un des plus grands fans de la magistrale Karine Viard, à un point tel qu'elle pourrait faire à peu près tout et n'importe quoi que je la trouverais formidablimissime. Outre le fait qu'elle est une des comédiennes les plus inspirées de sa génération, elle donne en plus une image saine et franche de son métier. Rares sont celles qui abordent les choses aussi humblement et simplement qu'elle, avec le recul et l'intelligence suffisants pour ne pas tomber dans les ornières de ce milieu qui regroupe une bonne majorité de névrosé(e)(s).


Néanmoins, de névroses, il va sérieusement en être question ! ! Après La Estupidez (La connerie), déjà avec Karine Viard,  L’Entêtement et La Paranoïa, l'argentin Marcial Di Fonzo Bo s’attaque à une nouvelle pièce de Rafael Spregelburd, Lucide, une comédie complètement barrée ou La Viard règne en grande maîtresse. Essayer d'en résumer l'argument est une entreprise bien périlleuse : les sujets abordés y sont multiples, les points de vue plutôt complexes, le discours rapide, ciselé, dense et bouillonnant tant et si bien qu'il n'est pas inenvisageable de ressortir de là en se disant : "euuuh, qu'est-ce que c'est que ce bordel ?". Et puis même, c'est le genre de truc qui ne se raconte pas, ça se vit (p****n, c'est beau ce que je dis !).

Mais bon, pour vous donner une idée : le thème principal de la pièce, qui lui donne son nom, est celui du "rêve lucide", ce type de rêve que l'on fait à l'approche du réveil, où l'on a conscience de rêver et où l'on peut faire évoluer les évènements selon son envie. C'est la thérapie que propose le docteur Jean-Jacques Rosso à Lucas, le fils de Tété, grand échalas rongé par les secrets de la famille, écrasé par sa mère étouffante, vivant depuis quinze ans avec le rein de sa soeur dont il est sans nouvelle depuis... Ce brillant thérapeute lui a accessoirement recommandé de s'habiller avec les vêtements de sa mère pour régler son Oedipe ! Bref, vous rajoutez là-dessus Lucrèce, la soeur, qui visiblement l'a trop réglé, elle ; tant est si bien que, quand elle revient après 15 ans d'absence, elle demeure dans une constante opposition à sa mère qui essaie égoïstement et par tout les moyens de rassembler cette famille qui part à vau-l'eau. Cadavres dans le placard, héritage et succession, psycho-drames, la pièce est une ribambelle de moments drôles et complètement déjantés, oscillant à un rythme effréné entre hystérie collective et surréalisme onirique. Tout ça ne fonctionnerait naturellement pas si ce n'était pas porté par des comédiens parfaits, de vraies Rolls-Royces pour le metteur en scène inspiré et débordant d'idées qu'est Di Fonzo Bo. Karine Viard est irradiante de talent dans le rôle de la mère hystérique, Léa Drucker excellente dans celui de la fille acerbe et quasi maniaco-dépressive, Micha Lescot somptueux dans le fils pétri de névroses et travesti contre son gré, et Philippe Vieux mieux que nature en amant lubrique de Tété.

Bref, vous vous doutez bien... Si je vous en parle, c'est... que vous devez y aller AB-SO-LU-MENT ! 


Photos : Christophe Raynaud de Lage


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