PARIS : Retour de Renée Fleming dans Otello, à l'Opéra Bastille

Reprenons nos petites habitudes : ça faisait une paille qu'on avait point causé lyrique ! Mais l'évènement est trop important pour le passer sous silence ! She's back ! Renée Fleming, star interplanétaire de l'opéra, soprano number one, qui règne sur la scène des plus grands opéras internationaux comme Maïté sur son ilôt central de cuisine (c'est dire !), Renée Fleming donc est enfin de retour à l'Opéra de Paris pour la reprise de la production d'Otello de Giuseppe Verdi, mis en scène par Andrei Serban ! Certes, on pouvait encore l'apercevoir de temps à autres sur la scène du Châtelet, ou plus récemment au Théâtre des Champs-Elysées, mais elle n'était plus remontée sur la scène de la Grande Boutique depuis ces démentielles représentations de Capriccio de Richard Strauss au Palais Garnier en 2004. Elle y incarnait la Comtesse avec une classe et une sensibilité qui ont fait fondre les plus récalcitrants. Depuis, le public parisien énamouré de sa voix de velours la cherchait partout... 

Elle revient donc dans une production d'Otello, certes pas l'une des meilleures, mais sûrement pas la pire non plus. Otello, tout le monde connaît l'histoire, c'est du Shake Spears (le frère de Britney) : encore une histoire où la condition féminine est mise bien à mal ! Otello est un super conquérant, genre invincible, qui vient de faire passer un mauvais quart d'heure à la flotte turque. Il rentre chez lui pour fêter ça et nomme dans la foulée Cassio au grade de capitaine. Graaaave erreur ! Iago (le méchant), jaloux comme un pou, promet de se venger. Il va tout faire pour détruire l'union heureuse d'Otello et de Desdémone, sa femme. Pendant toute l'intrigue, à grands coups de... mouchoir  (il va faire placer un mouchoir de Desdémone dans la chambre de Cassio), il va instiguer Otello à la suspicion, déversant en lui le sombre poison de la jalousie (mon dieu que c'est lyrique tout ça !) ! Cette pauvre fille va tenter de se disculper pendant tout l'opéra, mais Otello, un peu borné comme mec, va rester sourd à toutes ses implications. De plus en plus furibard, il va même la traîner par terre (mais que fait Ni pute, ni soumise !) en pleine réunion Tupperware... Non, je déconne, en pleine réception protocolaire, avec des VIP, des ambassadeurs, des Ferrero rochers, et tout et tout ! Là, le méchant Iago, qui lui a mis toutes ces mauvaises idées en tête, lui soumet l'idée de simplement occire sa chère et tendre là où elle a fauté : le lit nuptial ! Dans sa chambre, cette pauvre Desdémone, qui se doute que ça sent le roussi pour elle, fait une jolie prière, avant qu'Otello ne rentre, un poil énervé, et ne la tue. Quand Emilia (femme de Iago) entre à son tour dans la chambre et qu'elle voit le massacre, elle avoue à Otello que l'histoire du mouchoir, c'était du bluff. Là, Otello se sent mal... et du coup se suicide pour laver ses pêchés.

 



                           


                           


Quoi dire sur le spectacle ? Ben que la distribution n'est pas mauvaise du tout : même si Fleming éclipse tout le monde de sa présence irradiante, l'Otello d'Antonenko ne s'en sort pas trop mal. Tous les deux forment un couple très crédible. Mieux que ça : si on avait coutume de trouver parfois le jeu de comédienne de la Fleming un peu gauche, elle ballait tout ça d'un revers de manche. Face à un Otello complètement fou de rage et de jalousie, sans doute à la hauteur de ses possibilités de comédienne pour une fois, elle joue à la perfection la femme malmenée, apeurée. Inutile de dire qu'elle maîtrise vocalement à la perfection ce rôle qu'elle a depuis longtemps ajouté à son répertoire. D'une grande intelligence musicale, elle sait varier les effets d'intensité, se ménageant dans les petites interventions et remplissant la salle de Bastille dans ses grands airs. Sa voix est toujours aussi voluptueuse et charnelle. Les seconds rôles sont un peu plus en retrait, notamment le Iago un peu fatigué de de Lucio Galo (qui a néanmoins livré un très beau "Vanne ! La tua meta già vedo"). Il faut souligner la belle prestance de Michael Fabiano dans le rôle de Cassio, ténor à la voix puissante et au timbre clair. La mise en scène n'épargne pas quelques grossièretés de style, quelques poncifs un peu trop usés et quelques détails ridicules, mais elle n'entrave en rien les chanteurs. Au contraire, ils évoluent avec aisance dans un décor simple et peuvent donner toute la mesure de leurs talents.

Une très belle soirée pour les amateurs du répertoire verdien !



Otello de Giuseppe Verdi
Chœur et Orchestre de l’Opéra national de Paris, sous la direction de Marco Armiliato
Mise en scène d’Andrei Serban
Avec Aleksandrs Antonenko, Renée Fleming (du 14 juin au 1er juillet)/Tamar Iveri (du 4 au 16 juillet), Lucio Gallo (les 14, 17, 20 juin et 1er, 7 et 10 juillet)/Sergei Murzaev (les 23, 28 juin et 4, 13 et 16 juillet), Michael Fabiano, Francisco Almanzo, Carlo Cigni, Roberto Tagliavini
À l’Opéra national de Paris – Opéra Bastille
Place de la Bastille – Métro : Bastille
Jusqu’au 16 juillet – De 5€à 180 € - Durée : 2h50 avec entracte
Réservation : www.operadeparis.fr ou 08 92 89 90 90 (0,34€ la minute)



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